Poussé par le vent

Je m’attendais à de la pluie. Après tout, l’Angleterre se devait d’être fidèle à sa réputation. Mais j’en aurai eu pour mon sterling pound! De la pluie quotidienne, des vents de 100 km/h, de la grêle… mais surtout des paysages fabuleux, des routes agréables et des gens respectueux et attachants. J'ai peine à croire que mon pays numéro 1 est déjà plus d'une semaine et demie derrière moi.

Nick, et son groupe « expérimenté » de cyclistes.

Nick, et son groupe « expérimenté » de cyclistes.

Après être demeuré quelques jours à Bristol, à environ 200 km à l'ouest de Londres, je suis parti le matin du jeudi 24 mars pour cette incroyable aventure d'une vie. Nick, mon ex-beau-père que j'adore, a même lancé l'invitation à ses amis de son groupe cycliste local pour pédaler l'avant-midi avec moi, jusqu'à Bath. Se relayant chacun leur tour à mes côtés, ils me posaient des questions sur mon équipement, mon itinéraire, mes motivations. Et eux me partageaient en même temps leurs expériences de voyage et de vie. Je n'aurais pu avoir un meilleur départ.

Après un arrêt obligatoire pour le thé, je suis reparti seul, me dirigeant vers la Manche au sud. Malgré le poids du vélo, les kilomètres s'additionnent au fil des jours. Je visite Stonehenge à ma deuxième journée et rencontre deux heureuses touristes allemandes. Ce sont aussi les premières personnes du voyage en qui je constaterai la surprise et l'incrédulité lors d'une conversation qui commence généralement comme ceci :

- Tu t'en vas-tu avec ton vélo?
- Au Vietnam.
- QWAT?!?

Selina et Isabell, à Stonehenge.

Selina et Isabell, à Stonehenge.

Ma tente était pas mal heureuse derrière cette église retirée d'East Grimstead.

Ma tente était pas mal heureuse derrière cette église retirée d'East Grimstead.

L'Angleterre est faite pour le vélo. Beaucoup de routes sont très peu fréquentées, et les automobiles laissent beaucoup de place aux cyclistes, quitte à patiemment attendre le moment propice pour dépasser. Et le summum, chaque village a une église isolée qu'on dirait parfaite pour cacher ma tente. Je me demande comment j'ai déjà pu payer pour faire du camping!

Je dis ça, et en fait, je suis resté un soir dans un camping officiel et payant faute de pouvoir trouver un champs avant la noirceur. Ian, le gérant du Chichester Camping and Caravanning Club avait peur de me laisser dormir dans ma tente à cause des vents annoncés pour la nuit. J'ai donc utilisé leur buanderie comme appartement. Et une chance! Le lendemain, je constate que les vents de 100 km/h ont tout arraché sur leur passage, me forçant à contourner des arbres complets brisés ou déracinés.

Ian et Julie, au Camping and Caravanning Club.

Ian et Julie, au Camping and Caravanning Club.

Ce jour-là, avec un bon vent de dos, je fais ma meilleure distance quotidienne, 85 km, pour prendre le traversier entre Newhaven et Dieppe, en France. Je me fais croire qu'il fait plus chaud et sec en France, et qu'en prenant un traversier de nuit, je pourrai dormir, et repartir de l'autre côté pour une bonne journée...

Ce fut plutôt une nuit de 2h sur les bancs droits, et une arrivée plutôt rapide à Dieppe (je n'avais pas pensé au changement d'heure!). 

À 4h du matin, Alex et Marcus, deux crinqués britanniques faisant Londres-Paris-Londres en vélo, et moi, débarquons donc du bateau pour nous garrocher dans le terminal. Nous portons tous nos vêtements et grelotons quand même ! À 6h, le terminal ferme et on doit pédaler un peu jusqu'à un café du centre-ville, duquel nous partirons vers 7h30. Mais la suite étant en France, il s'agit d'une autre histoire!

Alex et Marcus, à Dieppe. Ce n'est pas plus chaud en France!

Alex et Marcus, à Dieppe. Ce n'est pas plus chaud en France!

Tous les vélos du bateau au même endroit, soit 3 !

Tous les vélos du bateau au même endroit, soit 3 !

Ce premier pays m'a permis d'apprendre beaucoup sur les gestes quotidiens d'un voyage cycliste en solo. Grâce à ces rencontres humaines, aux superbes paysages, à la facilité d'y rouler, à l'histoire omniprésente à chaque coin de rue, je garde un excellent souvenir de cette rapide randonnée de cinq jours en Angleterre. J'y retournerais avec joie pour l'explorer plus en profondeur, mais peut-être en juillet la prochaine fois!