L'avion aux temps du corona

Je suis de retour. Comme des milliers de Canadiens, j’ai repris il y a quelques jours le chemin beaucoup plus rapide de l’avion pour revenir m’isoler à la maison.

L’avion aux temps du corona n’était pas de tout repos ! 

Deux jours avant, j’avais réussi à changer mon vol en passant 6h en attente avec la compagnie aérienne. Puis, on m’a inventé de nouveaux règlements à l’aéroport de Cusco au Pérou en me disant que je ne devais avoir que mon vélo dans sa boite de carton. 

Mais sur place, aucune autre boite ou méthode d’envelopper n’était disponible. L’agent m’a suggéré de partir à pied pour aller m’acheter un « sac de plastique chinois » et de tout y mettre. Monsieur, mes poteaux de tente (et tout mon équipement de camping d’ailleurs) n’entreront pas facilement dans votre sac chinois.

J’ai donc transféré 3 kg de stock dans une de mes petites sacoches avant de revenir dire que tout était transféré. « Ce sera 40 USD de plus pour votre 2e valise », m’a alors dit l’autre agente ! (En plus de 35 USD que je paye déjà pour ma boite de vélo…)

« Et si je transformais maintenant mes 2 sacoches et mon petit sac à dos en seulement 2 sacoches ? ». La dame trouve un autre problème. « Tu dois pouvoir transporter ton effet personnel sur ton épaule ». D’accord, me dis-je, en transférant devant elle une bandoulière d’une sacoche à une autre. 

- Et maintenant ? 
- C’est beau.

Ça aura pris 1h30 pour enregistrer mes bagages.

L’avion part ensuite massivement en retard. J’arrive à Lima 30 minutes avant mon prochain vol vers New-York. Et il doit y avoir plusieurs milliers de personnes devant moi à chaque étape. Je cours en poussant mon barda jusqu’à la section affaires de l’enregistrement de United. 

- Ce sera 236 USD pour la boite de vélo. 
- J’ai déjà payé à Cusco.
- Ce n’était pas la même compagnie.

Voyant les minutes s’égrener, je tends avec tristesse ma pauvre carte de crédit. Puis je cours en montant l’escalateur vers les douanes. La file est longue de quelques centaines de mètres. Je me sers du collant jaune sur mon billet pour dépasser un nombre incalculable de voyageurs. Chaque employé à qui je demande où me diriger pour aller plus vite a l’air complètement dépassé. C’est chacun pour soi. Je passe sous des cordages et contourne des lignes, mais chaque nouvelle étape est constamment bloquée. 

Enfin, j’apprends que ce second vol est aussi retardé de plus d’une heure. J’ai le temps de respecter la dernière file qui est l’immigration. J’arrive à temps à ma porte, les bras allongés par mes lourdes sacoches.

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Le vol part finalement plus de 2h en retard, à 1h du matin. Cet avion, comme le premier, est plein à craquer. Tout le monde tente de revenir à la maison. Et le Pérou se vide de ses nombreux touristes en une seule fin de semaine.

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À New-York, je dois évidemment remplir mon papier de tourisme aux États-Unis, sortir des douanes avec mes bagages… et y entrer à nouveau. Heureusement, l’aéroport n’est pas si occupé. Les douaniers sont étrangement un mélange de très relax - ils parlent entre eux de leurs projets de fins de semaine - et extrêmement zélés. Comme celui qui regarde mes bouchons oranges pour les oreilles pendant une minute en s’imaginant je ne sais quoi. 

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Et là comme aux aéroports précédents, les voyageurs sont excédés et impatients. Tout le monde a encore plus hâte d’arriver qu’à la normal. Le simple fait de manquer de savon aux toilettes exacerbent les voyageurs les plus endurcis. 

Le lendemain après-midi de mon départ, j’arrive enfin à Montréal. L’aéroport est déserté et ça avance bien. Je prends mes choses et me dirige vers ma quarantaine.

Le contraste est frappant. Dans les derniers mois, j’ai vécu à rouler sur l’altiplano des Andes, à plus de 4000 mètres d’altitude. Peu ou pas de végétation, moins d’oxygène, et face à une telle pauvreté que les rares hôtels m’apparaissaient bien moins confortables que ma tente.

Me voici face aux arbres solides qui apaisent l’âme, à un hiver glissant que je ne connais plus et à une neige dont j’avais presque oublié la douceur.

Et je profite de ces moments d’inquiétude mondiale pour commencer aujourd’hui l’écriture du tome 2 de ces Histoires à dormir dehors.