Entre fleuve et montagnes dans la région de Québec
Après le tour du monde… le tour du Québec ? Pandémie mondiale oblige, j’ai ramené mes souliers à clip au pays et me suis élancé aux quatre coins de la Belle Province dans le but de mieux connaître notre arrière-pays. Première étape : la capitale.
Cet article a d’abord paru dans l’excellent magazine Vélo Mag, édition mars 2021.
L’escapade de trois jours est proposée sur le site Web de la Route verte, qui célébrait en 2020 ses 25 ans. Alors aussi bien commencer par une valeur sûre ! Ma douce moitié et moi partons de Lévis, face à Sainte-Pétronille sur l’île d’Orléans, plutôt que de Québec même. Le Parcours des Anses qui longe le littoral y est tranquille et soyeusement roulant. Surplombant l’horizon, le majestueux Château Frontenac s’élève au-dessus du Vieux-Québec, de l’autre côté du fleuve qui grouille d’embarcations de plaisance et de cargos. La vue est tout aussi agréable du côté de Lévis, avec un chapelet de belles maisons ancestrales et plusieurs parcs, avec entre autres l’animée fontaine du quai Paquet. Les files d’affamés s’étirent devant les quelques camions de bouffe de rue vendant burgers et crème glacée alors que les enfants sautent et courent entre les geysers d’eau fraîche émergeant du sol en ciment.
Le long de la voie cyclable se trouvent plusieurs affiches expliquant avec moult photos l’histoire de la région, de l’important chantier naval Davie à la vieille maison de Louis Fréchette, grand poète canadien du XIXe siècle.
En direction ouest, la falaise à notre gauche s’approche du fleuve tandis qu’on profite d’une vue franche sur l’eau à notre droite. Les résidences ont ce mur de roc dans leur cour arrière, et certains occupants s’en servent pour y déposer leur chaloupe à la verticale.
À Saint-Romuald, nous nous arrêtons au O’Ravito Café Relais, qu’on m’avait fortement recommandé, avec raison. Les copropriétaires, Ann-Rika Martin – exceptionnelle cuisinière et pâtissière qui a remporté la finale de l’émission Les chefs ! en 2017 – et sa mère, Odette Boulay, sont deux passionnées de cyclisme.
Un gravlax de saumon, une divine brioche et un cortado plus tard, nous reprenons la route dans une courte – mais pentue – montée vers l’étroit pont de Québec. La vue y est magnifique, mais il faut néanmoins garder l’oeil droit devant si on veut éviter la circulation en sens contraire, surtout avec une monture élargie par les sacoches.
Les manoirs
Entre fleuve et montagnes dans la région de Québec.
À la sortie du pont, nous suivons le chemin Saint-Louis jusqu’au parc Cartier-Roberval, où s’entassent chênes rouges, érables à sucre et pins blancs. Nous dévalons une courte inclinaison de 20% puis quelques marches d’un bel escalier en bois bordé de rampes pour vélos, pour finalement accéder à la rue Saint-Félix et au quartier de Cap-Rouge. Aux environs du Séminaire Saint-François, les maisons s’apparentent de plus en plus à de grands manoirs sur leurs immenses terrains. Sur l’un d’eux, on y trouve même un trou du parcours de golf ! L’auteur de ces lignes, quant à lui, transporte sa résidence de toile pour deux personnes derrière sa selle.
À partir de Saint-Augustin-de-Desmaures, le chemin du Roy longe de façon plus sinueuse la longiligne 138. Le cycliste a le choix entre le calme de l’ancienne voie ou le kilométrage plus rapide sur l’accotement de la route provinciale. Officiellement, la Route verte suit l’ancienne voie royale.
Le soleil couchant et l’idée d’une poutine à Neuville auront raison de mon objectif de me rendre à Donnacona. J’offrirai à ma princesse la cour d’une école primaire afin de planter notre manoir de nylon pour la nuit.
Les Écureuils
Jusqu’à Donnacona, nous suivons la route 138, bordée de nombreux kiosques vendant le fameux maïs sucré de Neuville, le seul de la province à être protégé par une appellation réservée.
Aux abords de la rue Notre-Dame, nous sommes attirés par des fanions multicolores et l’enseigne du magasin général ornant l’ancienne église de Saint-Jean-Baptiste de la Pointe-aux-Écureuils. Le coloré Marc Duval nous y raconte l’histoire de la région. Ce nom animalier viendrait des chênes, maintenant coupés, qui se trouvaient en grand nombre sur la presqu’île. «Qui dit chênes dit glands, et qui dit glands dit écureuils», de résumer en souriant le responsable des lieux. L’église, fermée depuis 2014, abrite maintenant un organisme visant à préserver le patrimoine local tout en offrant un endroit où se réunir.
La ville voisine tire quant à elle son nom de la Donnacona Paper Limited, qui avait au début du XXe siècle le mandat de fournir le papier nécessaire à l’impression du journal The New York Times. «Depuis la fusion municipale, conclut Marc en rigolant, nous sommes 7300 habitants à Donnacona… incluant les écureuils. »
La Jacques-Cartier
Un tournant vers le nord sur le chemin du Bois-de-l’Ail nous fera ensuite suivre la magnifique rivière Jacques-Cartier jusqu’à Pont-Rouge. C’est là que se trouve le clou de l’itinéraire : la piste cyclable Dansereau – La Liseuse. D’une longueur d’à peine 14 km, elle offre d’impressionnants points de vue sur le sauvage cours d’eau. Plusieurs petites haltes y sont aménagées, et on peut même faire une saucette dans les rapides. La piste de gravier roulante et sinueuse prend fin à SainteCatherine-de-la-Jacques-Cartier, tout juste au sud du grand lac Saint-Joseph. Invités par un charmant couple, nous passons là notre seconde nuit.
Le royaume des conifères à deux pas de la capitale.
L’ancienne voie ferrée connaît une seconde vie en devenant la vélopiste Jacques-Cartier/Portneuf.
Vélopiste vers Québec
La dernière journée nous fera découvrir la Vélopiste Jacques-Cartier/Portneuf, faisant également partie de la Route verte. Entourée d’épais conifères, elle me donne presque l’impression de monter au Labrador plutôt que de me diriger vers la petite ville de Shannon, à tout juste 25 km de Québec.
À partir de celle-ci, la voie cyclable redevient bitumée, et ses paysages, plus banlieusards. Comme la piste passe par Wendake, nous en profitons pour visiter l’intéressant Musée huron-wendat, à quelques coups de pédale de la Route verte 6. Non seulement ces lieux sont-ils une occasion de découvrir des pans plus méconnus de notre histoire, ils abritent également un excellent restaurant et un élégant hôtel certifié Bienvenue cyclistes !
Par le Corridor des Cheminots, la route nous ramène tranquillement et facilement jusqu’au Vieux-Québec, où nous prenons le traversier vers notre point de départ, à Lévis. Notre dernier coup d’oeil ira à nouveau au Château Frontenac, debout sur sa falaise et se réfléchissant dans le fleuve, une belle finale pour ce parcours d’eau et de collines.
Sur l’asphalte et le gravier, ce circuit est un charmant condensé des beautés de la région de la Capitale-Nationale. Cette première étape sur la Route verte québécoise m’aura également prouvé, si jamais j’en doutais, qu’ici comme ailleurs, le vélo est le meilleur moyen d’aller à la rencontre des gens, des paysages et de notre histoire.
L’escapade permet de goûter aux pavés du Vieux-Québec.
Repères
Durée: 3 jours
Itinéraire proposé ici.
MES BONNES ADRESSES
- O'Ravito café relais, à Saint-Romuald. Un des meilleurs café où j'ai mangé. Cet arrêt gourmand est incontournable.
- Relais de la Pointe-aux-Écureuils, à Donnacona. Pour parler à Marc Duval, le coloré et passionné employé du relais.
- Musée huron-wendat, à Wendake. Visite fort intéressante qui permet de connaître l'histoire et les traditions huronnes-wendat.
Le Bon monde de la Route verte est une websérie en 10 épisodes, que j’ai produite pour Vélo Québec. Tous les épisodes sont disponibles gratuitement ici.
Ça roule pas mal mieux une fois bien équipé !